Dave St-Pierre

Eh non, ce n'est pas un post sur un membre de ma famille, aucun lien!  Mais plutôt un billet sur les ressentis qui restent suite au spectacle de ce danseur que j'ai vu, gratuitement, ici à N-d-P.

Le spectacle en question, Néant, a été présenté dans une ambiance sans fla-fla, dans la petite église de mon village, lieu on ne peut plus commun.  Le tout commence par une présentation de l'artiste.  Artiste?  Oui, sans doute!  Mais pas Artiste avec un A majuscule comme on aime souvent les voir.  Dave commence par nous jaser, sur un ton qui ne laisse aucun doute : il ne fait pas partie d'une sacro-sainte clique de gens inaccessibles et déshumanisés.  Il est monsieur tout le monde.

Il nous présente le spectacle, vêtu d'un pantalon "cotton ouaté" gris, des pipeaux (comme disent les gens du coin!).  Déjà, je me sens bizz, je me sens trop proche du danseur.  Il est là, à quelques mètres de moi, il respire, nous parle comme des égaux.  Pas de barrières, pas de mur.

Sans grande transition, Dave se lève, les lumières se tamisent et ça part.  Un mélange de danse, de musique, de scènettes, d'effets visuels projetés sur le corps du danseur.  Le tout livré dans une grande proximité.  On entends les respirations, l'essoufflement, on voit la sueur perler, tout est là pour humaniser l'homme!

Normalement, au moment où le rideau tomberait, pour cacher les techniciens qui s'activeraient à déplacer le décor, à tirer des ficelles pour que tout soit en place pour la scène suivante, normalement quand l'artiste irait en coulisse pour reprendre sa respiration, s'hydrater, c'est exactement l'inverse qui se passe.  Dave St-Pierre déplace lui même le décor, boit de l'eau, reprends son souffle, sue, se dévêtit, se rhabille, tout ça devant nous, dans un dénuement désarmant.  Aucune ficelle, pas de magie, juste l'art, le ressenti.

Et du ressenti, j'en ai vécu!  Je me suis ému devant la beauté de la première scène.  Tout en douceur, très zen, très doux.  Puis du Vivaldi, beaucoup plus dynamique.  Mais jusque là, j'étais en terrain connu, rien de bien troublant, jusqu'à la scène où Dave se travesti, déguisé en femme avec une robe rouge et là je me mets intérieurement à dérailler.  C'est absurde, ça mène à rien, c'est malaisant, je suis clairement troublé, gêné, je me dis pourquoi j'ai entraîner mes deux amies ici pour voir ça!

Puis, ça continue.  Je vis tout!  L'expérience du corps, des émotions avec la projection d'images sur le corps de Dave, d'une beauté quasi spirituelle.  La transformation en être sombre, d'une grande sensualité, presque trop intime.  La puissance que je ressens quand cet homme noir se déboîte sur scène.  Le retour au calme, quand, pendant plusieurs minutes, la teinture est retirée.

Puis la scène de l'anéantissement...  Ça m'a pris aux tripes.  Cet homme qu'on voit vivre devant nous disparait dans un abime qui peut représenter la mort, le vide, l'oubli...  J'ai mal!

Le spectacle se termine comme il a commencé.  Sans transition.  Les lumières s'allument, et la jasette commence.  J'ai rien a dire.  J'ai haï, j'ai adoré, je suis sans mots.  Je suis troublé.  Je sais pas quoi dire.

Normalement dans ces représentations à N-d-P, j'aime partager ce que j'ai vécu, mes impressions, l'ambiance est propice à la discussion, mais là, je suis muet.  Prisonnier de ma tête, de mes peurs, de mes réflexions.

Les gens jasent, Dave explique, partage, j'écoute.  Je repars chez moi.  Je discute avec mes deux amies.  Et je prends du temps, beaucoup de temps pour me gérer.

Là, cinq mois après le spectacle, que reste-t'il?  Un souvenir puissant.  Et surtout, une impression solide, la peur que j'ai vu pour la première fois un spectacle qui m'a profondément troublé et que jamais je ne ressentirai une telle intensité de nouveau.

Comme si Dave St-Pierre, avec ce spectacle avait éveillé quelque chose en moi, qu'il m'avait fait découvrir quelque chose de beau.

Merci pour ce moment, pour ce maelström.

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